Religion et orthodoxie – non-communication au Congo belge – Kimbanguisme

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Religion et orthodoxie – communication coloniale au Congo belge – Kimbanguisme

Wyatt MacGaffey :”Kimbanguism & the Question of Syncrétism in Zaïre” 1994

Traduction : v.Graeve (LIEN à la version en allemand).   4 Illustrations

Wyatt MacGaffey a publié l’essai dans l’anthologie intitulée à juste titre « Religion in Africa. Experience and expression », ed. Blakely et al., pp. 240-256 – 1994).

Il y présente les développements et les tactiques des églises revivalistes concurrentes dans les pas de Simon Kimbangu (1887 ou 1889 jusqu’ à 1951, mort en prison), disciple «baptiste», prophète visionaire 1921 et martyr. Il explique la communication perturbée dans le contexte de la domination coloniale. Je traduis (en italique) longues passages de son argumentation en espérant de ne pas brouiller la clarté de son concept par mes commentaires courts personnels.

 

Introduction : « Être humain, c’est être syncrétiste » (Pye)

Mes peurs : Ce point de vue toujours contesté, est-il à nouveau remise en cause en 2023 par la fureur des groupes identitaires en Europe et l’Amérique?

(241) « Bien que le mot « syncrétiste » soit souvent appliqué aux religions, on s’est peu préoccupé de ses origines et de ses spécificités. Le terme ambigu décrit une religion ou une situation religieuse qui combine des éléments hétérogèness. Par contre cependant, toute culture et surtout toute religion est constamment basée sur des éléments étrangers. Michael Pye, citant une étude sur le syncrétisme de J. H. Kamstra, déclare qu'”être humain, c’est être syncrétiste”, mais que “la plupart des diplômés en religion sont fortement influencés par le christianisme et ont tendance à voir le syncrétisme comme contamination illicite, menace ou danger, comme un tabou ou comme un signe de décadence religieuse ». Le langage scientifique cache ainsi un jugement négatif. “Syncrétisme” est devenu un terme péjoratif, applicable uniquement aux situations que l’on désapprouve (Pye I97l:83-93).

Cela est également évident dans l’histoire des commentaires européens sur le kimbanguisme, l’un des mouvements religieux les plus importants au monde, initié en 1921 par le prophète congolais Simon Kimbangu. À partir des années 1870, la région du Bas-Congo faisait l’objet d’un intense travail missionnaire protestant puis catholique. Ellet était incorporée au Congo belge en 1908. Le mouvement de 1921 a généré un enthousiasme populaire généralisé mais a été rapidement réprimé par les Belges, qui ont emprisonné Kimbangu et ses partisans. La répression s’est poursuivie jusqu’en 1959, date à laquelle les fils de Kimbangu ont été reconnus par le gouvernement comme dirigeants de «l’Église de Jésus-Christ sur Terre par l’intermédiaire du prophète Simon Kimbangu» (EJCSK). Bien que l’EJCSK soit la plus grande, ce n’est en aucun cas la seule église à revendiquer l’héritage spirituel de Kimbangu.

L’essay de MacGaffey date de 1994. de.wikipedia propose donc une mise à jour détaillée, qui vaut bien de comparer. (LIEN au “Kimbanguistenkirche”; celle de fr.wikipedia (Église kimbanguiste) (LIEN) est très court , ce qui m’étonne.

MacGaffey se concentre uniquement sur le niveau « scientifique », mais le terme a des ramifications sociales et ses racines dans une suspicion très ancienne de “hérétiques” et “sectaires” dirigé aussi contre les “païens” d’outre-mer.

Lorsque les médias grand public pimeront leurs reportages d’Afrique avec des détails sur méga-églises, limousines allongées, promesses frauduleuses et pratique„sectaires“ , les préjugés et le rejet sont renouveléé. Le raisonnement de l’autre côté doit également être entendus et perçus.

 

Point de départ : Des fidèles «laïcs» partout

Au point de départ pratique, McGaffey inclut les fidèles « laics » de toutes les églises. Plus tard, dans le chapitre sur l’Église congolaise EJCSK, des dirigeants d’église et des théologiens seront visibles avec leurs intérêts « bureaucratiques », leurs problèmes et leurs doctrines stratégiquement choisies. (244)

« En général, les fidèles qui ne sont pas des savants sont incertains de leur foi et contradictoires dans leurs réponses aux questions de foi. Certes, leur compréhension du “sens” de leur religion comprend comme élément important une communication satisfaisante avec les autres dans le rituel. Le rituel lui-même est un événement social, se déroule dans un contexte social plus large et présuppose les valeurs ​​et les significations qui constituent la vie communautaire en ce lieu et à cette époque. Par exemple, cela règle une certaine routine de la semaine ou de l’année, une certaine allocation des ressources, une division du travail social entre hommes et femmes, adultes et enfants, et des ensembles communs de symboles visuels et verbaux qui expriment ces divisions. MacGaffey ajoute avec Edmund Leach (1954) une expérience quotidienne : « Dans le contexte d’actes rituels, deux individus ou groupes d’individus peuvent accepter la validité d’une série d’actes rituels sans jamais s’entendre sur ce qui est exprimé dans ces actes ». (244)

 Tous les fidèles sont intimidés par les experts initiés, mais ils ont en commun la capacité de «tolérer des niveaux élevés de kakophonie cognitive» (244). Les experts (scholars) au contraire, capable d’ascèse, adorent le dépassement en permanence de la « dissonance cognitive » comme le moteur du « progrès » scientifique.

 

L’État colonial bureaucratique

 Le Congo belge était un État colonial européen. Il a réussi à utiliser les institutions autochtones tout en maintenant la différence et la subordination.

MacGaffey utilise le terme « société pluraliste » pour ce phénomène, mais le terme a un tout autre sens dans l’usage général européen.

Vivre dans une colonie signifiait – et signifie – pour les Africains de s’adapter à long terme à un ordre social et à un système de valeurs plus puissants. L’existence des Congolais dans deux systèmes contradictoires a conduit à une double identité inconciliable. Seuls des ignorants ont pu croire que le “oui” africain au “baptême chrétien” et à la “conversion” dans une ‘inégalité incroyable était une décision spirituelle et sans arrière-pensées.

« Créé en 1908, le Congo belge a incorporé un grand nombre de sociétés indigènes dans un nouveau tissu politique de bureaucratie européenne. Le kimbanguisme est né chez les Bakongo de la région côtière atlantique. La société kongo était caractérisée par une descendance matrilinéaire, une économie d’agriculture de subsistance recouverte d’un important volume d’échanges entre la côte et l’intérieur, et une cosmologie dans laquelle l’influence des esprits des morts sur les vivants était représentée par des chefs, des prêtres, des sorciers et sorcières.

Les institutions de ce type ne sont pas facilement comprises par les Européens. Ils attendent des anthropologues qu’ils les interprètent.

Les institutions de la colonie elle-même leur étaient relativement familières. Celles-ci comprenaient la loi romano-néerlandaise, l’industrie capitaliste, le gouvernement bureaucratique et le christianisme catholique et protestant. Le secteur bureaucratique a poursuivi une politique dite de « gouvernement indirect », utilisant les institutions dites «traditionnelles » du pays dans la mesure où celles-ci représentaient l’adaptation sociale des Bakongo au régime colonial au XXe siècle.

Elles n’étaient plus “traditionnelles”, pas plus que les institutions du secteur bureaucratique, mais qu’elles étaient maintenues par le régime colonial dans leur différence et leur subordination pour des raisons politiques.

 

Non-Communication

Problème de communication entre les institutions européennes et indigènes, mutisme et incompréhension entre le personnel colonial blanc et les colonisés

(245) Chacun de ces groupes d’institutions a adopté sa propre vision du monde (cosmologie) et a utilisé ses propres systèmes de signes. Le secteur bureaucratique était fondé sur une conception linéaire du temps et, pendant la période coloniale, sur la réalité de la race.

La cosmologie du secteur africain traditionnel supposait un concept du temps répétitif cyclique ou en spirale et incluait la croyance que lorsque les Noirs meurent, ils vont en Europe ou en Amérique où ils deviennent blancs et d’où ils peuvent retourner en Afrique en tant qu’ancêtres ou esprits, pour de bon ou à des fins malveillantes.

Les codes culturels contenaient des règles contradictoires sur des choses telles que les gestes, la prééminence sociale et la tenue vestimentaire appropriée pour les hommes et les femmes.

Le moyen de communication le plus important était bien sûr la langue, qu’elle soit française ou kikongo, sémantiquement et pratiquement étroitement liée aux ensembles institutionnels respectifs.

Dans aucune de ces cosmologies, des concepts tels que le passage unilinéaire du temps, la réalité de la race ou l’Europe en tant que pays des morts ne sont scientifiquement nécessaires ou transcendantalement vrais. Mais dans tous les cas, le contenu de la cosmologie peut être lié à l’organisation de la société, avec laquelle elle façonne l’expérience des membres, “formulant des notions d’un ordre général d’existence et entourant ces notions d’une telle aura de factualité” que les humeurs et les motivations qu’il établit “apparaissent singulièrement réalistes” (Geertz 1966; MacGaffey 1978a).

Doku.

McGaffey Kimbanguism p.240 –(240) : Cette croix grave avec le trou au milieu ne décrit que marginalement la crucifixion du Christ, car les chrétiens Bakongo ne le voient pas comme un agneau sacrificiel, mais comme un guérisseur et médiateur respecté. Selon une vieille croyance, c’est la croix de chemin. Un bras sépare ce monde de l’au-delà, le second indique le chemin du pouvoir entre les mondes et le trou au milieu fait référence à la tombe elle-même.

(246). Entre 1908 et l’indépendance nationale en 1960, les Bakongo sont progressivement intégrés au secteur bureaucratique. Ils ont été convertis au christianisme, éduqués à l’européenne, mis au travail salarié et soumis à l’impôt. Ils ont participé à l’État, à l’Église et à l’industrie, mais sur une base entièrement différente des Européens, et dans leur vie privée, ils sont restés soumis aux institutions et aux codes congolais qui réglementaient la succession telles que les relations conjugales, interpersonnelles et locales. C’est-à-dire que sous la domination coloniale, les Bakongo appartenaient à deux sociétés dans lesquelles le “sens” s’exprimait non seulement en matière religieuse mais dans toutes les matières sociales, dans des langues différentes (kikongo et français) et des pratiques symboliques différentes.

Dès que les locuteurs de kikongo et les francophones communiquaient au-delà des significations les plus superficielles ou pratiques, il y avait un niveau élevé d’incompréhension des deux côtés. Un vocabulaire colonial spécial, ni français ni kikongo, a été développé pour combler cette non-communication ; en religion, certains des mots les plus utiles étaient « nbngo », signifiant « sacré » pour les Européens et quelque chose comme « tabou » pour les Africains ; «sumuka », « pécher» ou « ataboo blesser, souiller » ; nka.diampemba, « le diable » ou « l’esprit vengeur » ; et ainsi de suite. La communication étant autant d’interaction, y compris rituelle, une ambiguïté similaire s’étend à tous les contextes institutionnels, pas seulement à la religion (Doutreloux 1967).

Dans l’État colonial, où se maintiennent deux groupes distincts, l’un politiquement et économiquement subordonné à l’autre, cette situation va se renouveller dans l’esprit des générations à venir. Après l’indépendance la forme de cette relation est restée, bien que la structure de classe de la population ait changé : les contremaîtres et employés africains des entreprises, des missions et des gouvernements ont remplacé les Européens comme gestionnaires de ces organisations et donc de l’État. En attendant, presque tous les Zaïrois continuent de vivre selon deux ensembles de règles, consciemment et visiblement séparés ; Dans tous les contextes publics, les vérités du cadre institutionnel bureaucratique dominent celles du cadre habituel, qui ne sont tolérées que dans la mesure où elles peuvent être représentées en français comme conformes aux catégories du monde bureaucratique. (246)

 

Le kimbanguisme a émergé dans ce contexte social

(247) La religion chez les peuples de langue kikongo du Zaïre peut être représentée schématiquement par deux cercles superposés B et C avec une aire commune X. la langue de B est le français ; et sa structure institutionnelle, qui donne sens à la fois au langage et au comportement, est « bureaucratique ».

La langue de C est le kikongo et sa structure institutionnelle est coutumière.

Les croyances et pratiques qui relèvent de l’aire commune X peuvent être interprétées en français ou en kikongo et ont donc des significations alternatives ; Les objets appartenant à B ou C mais n’appartenant pas à X sont ceux qui ne peuvent être facilement décrits qu’en français ou en kikongo respectivement.

McGaffey Kimbanguisme p.253
Dok.

McGaffey Kimbanguism p.253

“Cette pierre tombale associe une croix chrétienne à la figure indigène d’un nkisi, qui ressemble souvent à un humain avec un miroir sur le ventre. (LIEN) Dans la pensée congolaise, il y a moins de distinction entre l’animé et l’inanimé ; un nkisi est invoqué comme un agent animé qui donne le pouvoir de guérir et de résoudre d’autres problèmes. L’animation du nkisi est attribuée par les Bakongo à la présence du mort dans ou sur la figure (parfois un ancêtre).

minkisi mit Spiegeln  – c. Gv

 

 

 

 

 

 

 

 

 

EJCSK comme exemple

pour le jeu d’équilibriste des églises africaines indépendantes

 Comment le mouvement populaire messianique autour du prophète Simon Kimbangu est-il devenu une église libre reconnue après 1959 et même membre du protestantisme international pendant des décennies ? Comment pourrait-elle obtenir une reconnaissance internationale sans perdre son soutien au sein de la communauté indigène ?

L’Église des Fils du Prophète Kimbangu, décédée en 1921, EJCSK, qui n’a été légalisée qu’en 1959, avait commencé comme un mouvement populaire – à situer en C – et s’est de plus en plus déplacée vers B depuis sa reconnaissance. Cela a été largement forcé par des considérations politiques et a eu à la fois ses coûts et ses avantages. Les dirigeants sont conscients des ambiguïtés impliquées et leur appareil de propagande a extraordinairement réussi à les manipuler devant un public kikongo et francophone. Ces manipulations sont socialement et politiquement nécessaires et ne peuvent être réduites ni à l’ignorance théologique ni à la malhonnêteté. Prenons un exemple concret.

 

Les Règles de l’Église (EJCSK s.d.) en plus des Dix Commandements

  • Respectez le gouvernement (Romains 13:1-3).
  • Aimez tout le monde, même votre ennemi (Matthieu 5:4345).
  • Ne pas fumer, que ce soit du tabac ou du chanvre.
  • Pas d’alcool.
  • Pas de danse ou de participation à des danses.
  • Ne nagez pas nu ou ne dormez pas nu.
  • Pas de contestation.
  • Aucune utilisation de sorts ou de magie.
  • Payer des taxes.
  • Ne garde pas rancune.
  • Chacun doit admettre son méfait devant témoins.
  • Les seuls tabous alimentaires interdisent de manger des singes ou des cochons.

 

Interprétations alternatives

(248) Toutes ces règles peuvent être considérées comme ayant un sens en termes européens (francophones) ou africains (kikongo), mais certaines s’intègrent beaucoup plus facilement dans l’une que dans l’autre, et la signification de toutes change de perspective.

 La Règle I, Respect du gouvernement, est la moins ambiguë et semble inclure la Règle 9, Paiement des taxes. En fait, la fiscalité est une pratique bureaucratique à laquelle les gens se sont habitués au cours de ce siècle, mais qu’ils continuent de rejeter, généralement (et avec une certaine justification), y voyant un prélèvement obligatoire au profit de la classe dirigeante ; ils l’opposent à des dons personnels, « volontaires », comme à un chef ou à un patron.

Les règles 3, 4 et 5 correspondent à la morale protestante (baptiste), mais ont également un sens en termes indigènes ; les danses en particulier ne sont pas considérées comme immorales en soi, mais comme des occasions d’immoralité.

La règle 8, contre la magie, a du sens à la fois en termes européens (“pas de superstition”) et en termes congolais (“pas de commerce égoïste dans l’occulte”).

Les règles 2, 7, 10 et 11 semblent n’être que de bons conseils moraux, mais frappent par leur multiplicité redondante. En fait, du point de vue des Bakongo, ce sont des prescriptions contre la sorcellerie, ou contre les attitudes dont la sorcellerie peut inconsciemment découler.

Les règles 6 et 12 ne sont pas facilement justifiables en français, et les tentatives des kimbanguistes pour le faire sont remarquablement insatisfaisantes. Pour éviter de se baigner ou de dormir nus, les kimbanguistes disent que des personnes du sexe opposé pourraient passer par le lieu de baignade ou que la maison pourrait prendre feu, obligeant le dormeur non préparé à s’exposer au public. En ce qui concerne les dangers réels, tout le monde y est confronté, et il n’y a aucune raison pour que des précautions raisonnables ne soient pas incorporées dans la politique de l’Église. Les membres d’autres églises suivent les mêmes règles et déclarent plus volontiers que dans la surface réfléchissante de l’eau, on peut voir et être vu par les gens de l’autre monde, « les anges », dont certains sont du sexe opposé. De même, les personnes religieuses s’attendent à être visitées par des “anges” pendant leur sommeil. Comme l’a dit un ancien ministre de l’Église des Douze Apôtres à propos d’une expérience remarquable : « Je venais de m’endormir lorsque l’ange du Seigneur m’est apparu dans une grande pluie d’étincelles ; heureusement que je portais de bons slips ». Au Kikongo ces « anges » sont les morts (bafwal).

Règle 12. Le tabou contre le porc est diversement expliqué par les kimbanguistes en se basant sur la loi mosaïque, l’histoire du porc Gadarene, les mauvaises habitudes alimentaires des porcs, ou le risque de parasites et de maladies. L’insuffisance de ces explications est évidente. L’histoire la plus proche du véritable argument est l’histoire du cochon Gadarene dans lequel les mauvais esprits ont fui Jésus (LIEN); Les porcs domestiques sont des réservoirs populaires dans lesquels les sorcières emprisonnent l’âme de leurs victimes, et manger des porcs domestiques signifie risquer de participer involontairement à des fêtes de sorcières. Une légende kongo insinue que les sorciers ont en tête une fête cannibale lorsqu’ils parlent de manger du porc.

Les kimbanguistes sont autorisés à manger du sanglier. Tout comme le chef de l’église, Joseph Diangienda, m’a expliqué : « Il y a deux sortes de singes ; l’un est interdit, mais l’autre nous pouvons le manger. Il n’a pas précisé, mais Andersson explique que les singes Makaku (ou Nsirut) vivent en gangs, tandis que les singes Nsengi vont par paires mâle-femelle et sont considérés comme des personnes déguisées (bituzi) (Anderson 1958 : 176).

 La comptabilité théologique kimbanguiste n’est pas seulement une question de comptabilité en partie double. L’église doit faire partie d’un ou même des deux groupes institutionnels. Chacun nécessite une adaptation de la forme et de la pratique organisationnelles, ainsi que du comportement et du langage.

 

Scandale de la communion protestante

 (249). Pour que l’EJCSK survive, l’église a dû développer une structure bureaucratique, un système fiscal, un système scolaire et diverses croyances formelles. Plus récemment les attentes de la théologie protestante, dont dépend dans une certaine mesure le soutien international et local de l’Église, les ont poussés à instituer un service de communion, célébré pour la première fois en avril 1971. Une telle démarche pourrait l’EJCSK coûter cher si elle va à l’encontre des idées reçues. Comme l’explique Andersson, la communion elle-même sous sa forme baptiste (en tant que commémoration plutôt que sacrement) est incompatible avec les notions populaires de péché, de grâce et de rédemption, même si elles se retrouvent dans les églises missionnaires (Andersson 1968 : 148-153, 169- 171).

Pour le peuple, le royaume de Dieu « sur terre » est une question de libération de la souffrance. La souffrance est causée par la violation des ordonnances cultuelles ou par la sorcellerie, bien que les pasteurs protestants orthodoxes se donnent beaucoup de mal pour convaincre leurs congrégations que la souffrance est en fait causée par “Satan” qui est devenu une sorte de sorcière polyvalente. Même au sein des églises missionnaires, la communion est souvent considérée comme une épreuve (engl. ordeal )pour détecter et punir les sorcièr(e)s, et comme telles épreuves, les ecclésiastiques peuvent en abuser s’ils sont eux-mêmes des sorciers.

En 1966, certains pasteurs Bakongo, fervents défenseurs de l’orthodoxie missionnaire contre toutes les formes de prophétie, ont rejeté la Cène du Seigneur (communion) comme un élément inutile de la culture européenne pour le vrai christianisme et ont estimé qu’elle devrait être abolie à une époque d’indépendance croissante vis-à-vis du contrôle missionnaire. L’introduction de la communion par l’EJCSK devait donc être soigneusement préparée. Dans le domaine du discours bureaucratique, l’Église a d’abord fait une déclaration théologique, rédigée par le secrétaire général. Moins facilement compréhensible pour l’observateur étranger était l’exécution ponctuelle d’un rituel préparatoire spécial, dans lequel M. Diangienda lui-même ou l’un des prêtres (sacificateurs) “scellait” chaque croyant sur le front avec le signe de la croix dans l’eau de Nkamba (Martin 1975 : 161, 179-182). Aucune explication n’a été fournie aux étrangers quant à l’origine du rituel, mais le geste, d’origine catholique, a longtemps été utilisé comme une bénédiction par Diangienda et est généralement compris comme étant bénéfique pour le« lusunzi » [son âme ou chance de vie] du destinataire. ]. ….Jusqu’en 1980, la communion n’était célébrée que deux fois.

Après 1960, l’église a perdu une grande partie de son soutien populaire, restreignant les pratiques extatiques et de guérison qui étaient incompatibles avec ses besoins organisationnels; les gens ont commencé à dire que c’était juste une autre église missionnaire.

 

Les Retraites

 En 1972, dans un effort pour renouveler sa vitalité spirituelle et sa discipline, l’EICSK a institué une nouvelle observance – les Retraites. Des précédents bibliques ont été cités pour cette nouvelle institution, qui aurait également prédit Kimbangu. Les retraites avaient lieu au plus profond de la forêt ou dans un autre endroit sans distraction. (250) On disait que les kimbanguistes avaient l’obligation à vie d’y assister, mais les membres d’autres églises et confessions étaient les bienvenus.

Une retraite durait du mardi au samedi et était marquée par de fréquentes prières, un jeûne de trois jours, une étude biblique, la confession des péchés et d’autres exercices censés renouer le contact avec le Saint-Esprit, comme autrefois à Nkamba en 1921. Chaque nuit, les hommes et les femmes dormaient séparément dans leur camp dans la forêt, et neuf hommes et neuf femmes (ou 3, 5 ou 7, mais pas un nombre pair) étaient nommés des vigiles, qui se relayaient pour prier toute la nuit. Des confessions publiques ont été écoutées toute la matinée, puis les participants, en nombre impair, se sont enfoncés plus profondément dans la forêt pour prier et chanter des hymnes. Chacun a fait le sacrifice de ne pas manger, boire ou se laver pendant au moins un jour, certains même deux ou trois. De temps à autre, quelqu’un devenait possédé et courait en criant à l’un des pasteurs pour lui avouer quelque chose qu’il n’avait pas dite. Ne pas avouer signifiait risquer une maladie mentale ou même la mort.

Dans la forêt, les gens ont commencé à avoir des visions : « Christ crucifié, ou vous pourriez voir un œil énorme qui était peut-être l’œil de Dieu, nous ne savons pas ». Les gens parlaient dans des langues étrangères comme l’anglais qui étaient compréhensibles pour les autres mais pas pour le locuteur. Les rapports de vision ont été enregistrés et envoyés au siège de l’Église. L’institution de la Retraite témoignait de la capacité de renouveau adaptatif de l’Église, mais elle comportait aussi ses propres risques. Inévitablement, à mesure que l’Église se rapprochait de l’énergie enfermée dans les véritables authenticités de la culture indigène, sa rivalité avec les systèmes concurrents de leadership spirituel s’est aggravée. Il n’est donc pas surprenant que traiter avec des magiciens et recourir à des sorts (“fétiches”) aient été des sujets importants et fréquents de confessions publiques (MacGaffey 1976: 40-43).

 

Les rituels des églises prophétiques en générale

(250)  Au Zaïre, comme dans une grande partie de l’Afrique, du Nigeria à la République d’Afrique du Sud, les rituels des églises prophétiques montrent généralement deux phases (voir Kiernan 1976 : 356-366). La première phase consiste en un service protestant ordinaire : hymnes, prières, lecture de la Bible et sermon. La deuxième phase, marquée par l’apparition du Prophète lui-même et d’autres changements de personnel, de musique et d’espace, est spécifiquement dédiée à l’activité prophétique et est très ambiguë.

Les activités prophétiques courantes comprennent les prédictions oraculaires et les révélations (lmbikudulul), les manifestations extatiques, les bénédictions comme prophylaxie, la guérison spirituelle, la “guerre” avec des pouvoirs spirituels hostiles, et en particulier dans les églises Ngunzist (DMN), une forme de test spirituel et d’affirmation qui relève de le mot français «bascule » [peser] (Janzen et MacGaffey 1974, n° 48). Toutes ces pratiques sont justifiées par référence aux textes bibliques, tout comme les pratiques des églises protestantes (évangéliques) américaines. Les participants se considèrent comme protestants ou catholiques. ……. Je dois renoncer à la discussion ultérieure de Mac Gaffey sur l’église DMN Kimbangiste concurrente et d’autres églises.

 

Je dois renoncer à la suite des discussions de Mac Gaffey sur l’église DMN Kimbangiste concurrente et d’autres églises.  pp. 251-56 

À Suivre plus tard si Vous êtes interessé v.Graeve.  25.1.2023

 

 

 

 

 

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